L’Angleterre, moteur flamboyant de l’essor économique du football féminin

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En s’imposant au sommet du football européen, la sélection anglaise ne décroche pas simplement un trophée : elle incarne une révolution. Dans les tribunes comme sur les écrans, les Lionesses sont devenues des icônes d’un sport féminin en pleine mutation, soutenu par une croissance économique sans précédent.

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Une révolution à un million de livres

Il aura fallu patienter 46 ans, mais le symbole est fort : le 17 juillet 2025, la Canadienne Olivia Smith est devenue la première footballeuse transférée pour 1 million de livres sterling (1,15 M€), rejoignant Arsenal en provenance de Liverpool. Le montant est modeste à l’échelle masculine — il représente 1/222e du transfert de Neymar au PSG — mais il marque un tournant majeur pour le football féminin.

Et ce n’est pas un cas isolé : six des sept plus gros transferts de l’histoire de la discipline ont été conclus en 2024 et 2025, dont trois par des clubs anglais. Le boom du football féminin ne se limite plus à une simple médiatisation : il est devenu un phénomène économique à part entière.

Un Euro 2025 record

Organisé par la Suisse, l’Euro 2025 a pulvérisé les précédents standards. Avec des recettes doublées par rapport à l’édition 2022 en Angleterre, et dix fois supérieures à celles de 2017, le tournoi confirme que le football féminin est désormais une machine commerciale puissante.

Les droits télé ont eux aussi explosé, et la finale a rassemblé 16 millions de téléspectateurs rien qu’au Royaume-Uni, dans les foyers, les pubs ou les fan zones de Londres et Manchester. Un total estimé de 500 millions de personnes aurait suivi au moins un match de la compétition dans le monde.

L’Angleterre, exception ou locomotive ?

L’Angleterre n’est pas seulement championne d’Europe, elle est aussi la référence mondiale en matière d’intégration et de structuration du football féminin. Les clubs historiques de Premier League — Arsenal, Chelsea, Manchester City, etc. — ont tous investi dans leurs équipes féminines, offrant des infrastructures et une visibilité que peu d’autres pays égalent.

En France, l’engouement reste plus mesuré. Le quart de finale des Bleues contre l’Allemagne a réuni 5 millions de téléspectateurs, un chiffre honorable mais bien en deçà de la mobilisation britannique.

Des primes encore loin de l’égalité

Malgré leur statut de championnes, les primes des Lionesses restent bien inférieures à celles des hommes. Chaque joueuse a touché 2 300 euros par match, plus une enveloppe globale de 2 millions d’euros à se partager, soit un cinquième de ce qui était promis aux hommes en cas de sacre à l’Euro 2024. Cela représente environ 80 000 euros par joueuse, un chiffre respectable mais qui ne reflète pas l’impact qu’elles ont généré dans tout un pays.

De nouvelles reines de la publicité

Heureusement, les sponsors comblent cet écart. En juillet 2025, aucune personnalité du sport anglais n’est plus prisée qu’une Lioness. Sur les écrans d’ITV, des pubs omniprésentes mettaient en scène Leah Williamson (capitaine de l’Angleterre et d’Arsenal) et Lauren James (Chelsea), égéries de Google Pixel, de déodorants ou de snacks énergétiques.

Lucy Bronze, malgré une blessure au tibia, a joué l’intégralité du tournoi et brille aussi en dehors des terrains : Visa, Pepsi, Spotify, Cupra, et bien d’autres. Alex Greenwood touche plus de 250 000 euros par an grâce à Under Armour. Quant à Chloe Kelly, elle incarne à elle seule ce tournant commercial : après avoir célébré un but décisif en dévoilant un soutien-gorge estampillé Nike, elle a signé avec Calvin Klein, Google et Land Rover, qui lui aurait offert un contrat avoisinant 2,5 millions d’euros.

Salaires : la WSL prend le large

Les salaires en Women’s Super League (WSL) sont en nette progression. Chez les grandes écuries comme Arsenal ou Chelsea, certaines joueuses approchent désormais le million d’euros par saison, primes comprises — du jamais vu en France, où le salaire moyen dans la D1 Arkema est de 46 640 euros brut par an. Seuls l’OL (240 000 € annuels en moyenne) et, dans une moindre mesure, le PSG (156 000 €) tentent de suivre.

Un boom encore élitiste

Mais ce développement, aussi spectaculaire soit-il, ne profite encore qu’à une minorité. Le football féminin tire sa croissance des compétitions internationales plus que des clubs, ce qui concentre les retombées sur une poignée de joueuses d’élite. Une vingtaine tout au plus bénéficient réellement de cette nouvelle ère dorée.

Le train est lancé à grande vitesse, certes, mais seules les premières classes sont occupées pour l’instant. Le défi des prochaines années sera de faire bénéficier l’ensemble de la pyramide de cet élan historique.

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